A l’heure de la mondialisation,
les différences culturelles sont-elles des atouts ou des freins ?
En terme de développement des entreprises, les différences culturelles s’expriment à deux niveaux : la gestion des risques interculturels internes (appelée autrement le management interculturel) et la gestion des risques interculturels externes. Les risques interculturels s’expriment de plusieurs façons : le rapport à l’autorité, les leviers de motivation, la gestion du temps, l’organisation du travail, les relations avec la clientèle, etc. Autant de facteurs que le dirigeant doit prendre aujourd’hui en compte afin de créer des conditions satisfaisantes et propices au développement de son entreprise.
En effet, face à l’internationalisation des activités, les équipes des entreprises internationales sont de plus en plus confrontées à une nouvelle problématique, celle de la « relation client » : mieux connaître « le client » pour mieux développer « ses marchés ». A ce niveau du développement par « la relation client » on n’entend pas seulement les études purement économiques et stratégiques mais aussi des études des différents codes culturels des pays dont ils sont originaires.
Il est bien sûr délicat et difficile d’estimer l’impact de la gestion des risques culturels d’une entreprise. Cependant la réalité des opérations, la complexité des environnements, la diversité voire la divergence des codes peuvent être sources d’échec d’une implantation sur le marché international.
Par exemple la grande maladresse de l’équipementier Puma vis-à-vis des Emirats Arabes Unis.
Le 2 décembre 2011, les Emirats Arabes Unis ont fêté leur 40ème anniversaire. A cette occasion, l’équipementier Puma a eu l’idée de créer un modèle spécial de chaussures de sport en reprenant les couleurs du drapeau des EAU. La sortie de ce modèle dans les magasins des Emirats a provoqué une vague d’indignation, ce qui a contraint Puma à le retirer du marché et à diffuser un communiqué pour s’excuser.
Pour les pays arabes, un drapeau national représente un pays. Il est absolument incorrect de le faire figurer sur des chaussures ou sur quoi que ce soit porté sur les pieds. C’est un grand manque de respect. Cette réaction indignée peut nous sembler étrange en Occident.
La culture se manifeste donc dans une interaction entre individus. En situation d’interaction, un chef d’entreprise averti reconnaîtra alors non seulement ses propres valeurs, ses comportements, ses points de vue et visions des choses mais également les valeurs, comportements et points de vue de l’autre. Une fois qu’il a identifié et intégré les spécificités culturelles de la clientèle, le chef d’entreprise devra accorder beaucoup d’attention à sa communication, pour construire des messages aussi bien sur le fond que sur la forme qui seront compris dans son intention originelle.
Au niveau international, la prise en compte de la diversité culturelle devient un impératif pour réussir une évolution durable. La culture reflète non seulement des coutumes et des traditions, mais aussi une vision de la vie, des croyances, des codes et des valeurs…
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Dans ce contexte d’interactions général, quelle était l’orientation de l’évolution culturelle du peuple libanais ? Quels sont les critères marquants de cette culture libanaise ? Ces critères représentent-ils un moteur de l’évolution de l’expertise libanaise ou sont-ils plutôt ses freins ? Ces évolutions ont-ils eu la même orientation chez les libanais du Liban que les libanais de la diaspora ?
Depuis le XIXème siècle le Liban a vécu plusieurs vagues d’émigration vers des destinations multiples. La plus importante communauté libanaise est installée aujourd’hui en Amérique latine, en particulier au Brésil. Il existe aussi d’importantes communautés libanaises aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Europe principalement en France.
Peu de pays dans le monde peuvent se vanter d’avoir plus de ressortissants à l’étranger que sur leur propre sol. C’est le cas du Liban, qui compte une diaspora ancienne mais aussi plus récente de plus de 12 millions de personnes, contre seulement 4 millions d’habitants sur le sol libanais.
A travers ce panorama on peut constater que le Liban est confronté depuis quelques années à un sérieux problème, celui de l’émigration de ses jeunes diplômés vers d’autres pays plus attractifs, économiquement voire socialement parlant. Salaires trop bas, instabilité politique, font partie des motifs qui poussent les jeunes Libanais à s’expatrier. Si l’on ajoute à cela, un sentiment d’insécurité latent, consécutif à l’instabilité régionale du Moyen-Orient et la peur de l’avenir, cela donne un cocktail détonnant qui encourage la fuite des cerveaux. Cette dernière touche aujourd’hui toutes les familles libanaises. Au moins 50% des Libanais ont un membre de leur famille qui s’est expatrié. 77% d’entre eux sont des jeunes âgés entre 18 et 35 ans.
Malgré ses inconvénients, la fuite des cerveaux comporte aussi, dans le cas spécifique du Liban, des points positifs. En effet, le total des flux financiers de la diaspora représente plus que le total des investissements étrangers associé au total des dépenses touristiques dans le pays. Une économie réelle qui pourrait bien sûr favoriser les investissements et par là-même, créer des emplois.
Les Libanais sont très demandés sur le marché du travail à l’international, car ils ont une grande créativité. Une grande adaptabilité et une capacité d’intégration. Leur expertise est souvent reconnue.
Les « experts libanais », entrés dans l’ère de la mondialisation, mettent désormais en place des outils d’influence pour asseoir leur image et leur crédit partout dans le monde. En effet, leur présence dans de nombreux pays les oblige non seulement à adapter leur discours, leurs produits et leur management aux contextes culturels locaux, mais aussi à façonner ces contextes culturels dans un sens favorable à leurs intérêts.
Pour les libanais, l’interculturel est d’une profondeur insoupçonnée puisqu’il met aux prises l’ensemble des cultures issues de toute l’histoire antérieure de l’humanité avec les stratégies qu’elles mettent en œuvre aujourd’hui. C’est la concurrence généralisée. Elle ne l’est plus au seul secteur économique, elle l’est à l’ensemble des autres secteurs tels que les secteurs scientifiques, techniques, esthétiques, médiatiques et religieux. Cela détermine un nouvel interculturel conflictuel sur les quatre plans : mondial, régional, national et local.
Au Liban, l’interculturel peut être considéré aussi comme source d’une culture mondiale, source de nouvelles cultures singulières de ce pays.
Les libanais risqueraient-ils un jour de perdre leur identité ?
Conclusion
J’aimerai conclure mon intervention par un extrait du livre « origines « de Amin Maalouf académicien :
« D’autres que moi auraient parlé de « racines »…Je n’aime pas le mot « racines », et l’image encore moins. Les racines s’enfouissent dans le sol, s’épanouissent dans les ténèbres ; elles retiennent l’arbre captif dès sa naissance, et le nourrissent au prix d’un chantage : tu te libères, tu meurs ! Les arbres doivent se résigner, ils ont besoin de leur racines ; les hommes pas. Nous respirons la lumière, nous convoitons le ciel.
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